Pisé, terre humide compactée dans un coffrage

La technique du pisé consiste à construire des murs massifs en compactant de fines couches de terre humide et pulvérulente dans des coffrages. Le mur est décoffré immédiatement après que la terre a été damée. La simplicité avec laquelle le tas de terre est transformé en un mur solide et cohérent par simple compression semble magique. Une fois décoffré, le mur présente une texture et une couleur uniques appréciées par les architectes, et il est inutile de l’enduire.

 

Le pisé est la seule technique qui permette de mettre en œuvre des terres contenant des cailloux et des graviers. Les dépôts d’origine glacière, autour des Alpes par exemple, forment d’excellentes terres à pisé : ce sont de véritables « bétons d’argile » prêts à l’emploi. Les terres plus fines peuvent également être compactées dans des coffrages à condition qu’elles ne contiennent pas trop d’argile, qui provoque de la fissuration lors du séchage.

Le pisé permet essentiellement de construire des murs massifs et rectilignes, bien qu’il soit également possible d’obtenir des murs courbes grâce aux évolutions récentes des coffrages. Les fines couches de terre compactée sont visibles, ce qui donne une texture unique aux réalisations en pisé.

 

Terre à pisé

Cette terre contient un mélange de cailloux, graviers, sables, silts et argiles en proportions équilibrées. Elle produit de véritables bétons naturels très durs, avec suffisamment d’argiles pour bénéficier d’un maximum de cohésion et suffisamment de grains pour que le matériau obtenu soit rigide et ne se fissure pas.

 

 

 

La mise en œuvre traditionnelle du pisé

Au printemps et à l’automne, la terre contient naturellement la bonne quantité d’eau pour être damée. Une fois extraite du sol, elle est versée dans un coffrage en bois à l’aide de seaux. Les planches du coffrage sont renforcées de chevrons, maintenus par de solides traverses appelées « clés », afin de résister à la poussée horizontale de la terre pendant la compaction. De fines couches de terre, de 10 à 20 centimètres d’épaisseur, sont étalées puis damées à l’aide d’un pisoir. Cet outil est une sorte de manche en bois à la base duquel est fixé une masse en bois ou en métal. Lorsque le coffrage est plein, il est déplacé à l’horizontale, le long du mur.

 

Les productions mécanisées

Aujourd’hui, la terre est compactée avec un fouloir pneumatique. Cet outil relativement léger est directement hérité de l’industrie de la fonderie où il sert à tasser le sable dans les moules. La fréquence d’impact est de 700 coups par minute. Les systèmes de coffrages ont beaucoup évolué et sont très diversifiés, la plupart étant issus de l’industrie du béton. Par exemple, certains d’entre eux, les « coffrages grimpants », assurent une progression verticale plus rapide que la progression horizontale traditionnelle. Les clés en bois sont remplacées par des tiges filetées ou des fers à béton, qui ne sont plus indispensables lors de la réalisation de murs trumeaux de faible largeur. De nouveaux engins permettent d’homogénéiser la terre et de la verser dans les coffrages. Grâce au godet-malaxeur par exemple, il est possible à la fois de tamiser les gros cailloux, de malaxer la terre, d’ajuster sa teneur en eau, puis de la verser en hauteur dans le coffrage.

Pour construire le Conservatoire Européen des Echantillons de Sols (CEES), l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) a choisi la terre crue pour sa capacité à réunir les deux conditions essentielles à la conservation d’échantillons : l’inertie thermique et la régulation hygrométrique. Le bâtiment a été construit en pisé, en compactant au fouloir pneumatique la terre crue dans un coffrage, couche par couche. Le chantier de construction et le bâtiment sont à découvrir dans la vidéo ci-dessous.

 

 

 

Murs en pisé préfabriqué : une technique innovante imaginée par Martin Rauch

Développée par l’entreprise de construction autrichienne Lehm Ton Erde et son fondateur Martin Rauch, cette méthode de préfabrication de murs en pisé révolutionne la construction en terre crue. Les éléments de façade sont préfabriqués en série dans un coffrage de 50 mètres de longueur. Ils sont ensuite entreposés pour sécher avant d’être transportés et posés sur le chantier. Les modules préfabriques sont mis en place avec un mortier de terre et les joints sont retouchés à la main avec le mélange de terre originel.

Du mélange des terres à l’assemblage des murs, la vidéo ci-dessous vous livre tous les secrets de fabrication des murs en pisé préfabriqués pour le centre ornithologique de Sempach en Suisse, conçu par l’agence d’architecture :mlzd.

 

 

 

Teneur en eau de la terre

Lorsqu’elle est compactée, la terre se trouve dans un état dit « humide », situé entre l’état sec et l’état plastique où elle devient malléable comme de la pâte à modeler. D’aspect pulvérulent, son toucher procure une sensation d’humidité, et elle ne peut être façonnée par manque de plasticité. En exerçant une forte pression de la main, il est possible de former une boule qui se brise quand on la déforme. Un test de chantier pour estimer la bonne teneur en eau de la terre consiste à lâcher cette boule à un mètre de hauteur sur le sol. Si elle se casse en trois ou quatre morceaux, elle possède la bonne humidité. Si elle s’éparpille complètement, elle est trop sèche. Si elle reste en un seul morceau, elle est trop humide.

 

 

 

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