Prototypes de murs en BTC ornementés pour améliorer le confort thermique du bâtiment
Le projet “Ornement et performance de la terre” a été désigné parmi les 12 lauréats de l’appel à projets FAIRE 2021. Proposé par l’Atelier Aïno en partenariat avec amàco, Franck Boutté Consultants et Cycle Terre, ce projet vise à démontrer si une texture en relief à la surface de Blocs de Terre Comprimée (BTC) et la manière de maçonner ces matériaux géosourcés peuvent démultiplier les qualités naturelles de la terre crue, et constituer ainsi une réponse écologique à la rénovation thermique des bâtiments. Partenaire du projet, amàco travaille aux côtés de l’Atelier Aïno comme appui technique essentiel : design des BTC, réalisation des moules des blocs, expérimentation puis fabrication des blocs de terre crue.
La raréfaction des ressources, la recherche de frugalité et d’économie mènent parfois le concepteur à créer des ambiances épurées, brutes ou standardisées. L’ornement peut-il contribuer aux performances hygrothermiques du matériau terre crue et retrouver ainsi une place dans l’architecture contemporaine, mais aussi au sein du patrimoine existant ? C’est ce que le projet “Ornement et performance de la terre”, lauréat de l’appel à projets FAIRE 2021, compte démontrer.
Au sud de l’Algérie, on dit des enduits traditionnels fouettés à la branche que leurs micro-reliefs créent de l’ombre et rafraîchissent ainsi la surface du mur et du bâtiment. Sur ce principe, Atelier Aino, Franck Boutté Consultats, amàco et Cycle Terre cherchent comment la texture à la surface de Blocs de Terre Comprimée (BTC) peut amplifier les qualités naturelles de la terre comme l’inertie thermique, la régulation hygrothermique ou la tactilité du matériau.
Trois murs prototypes en Bloc de Terre Comprimée (BTC) fabriqués puis analysés
Pour vérifier si un travail sur la surface des BTC et un appareillage spécifique de ces dernières ont un impact positif sur le confort intérieur été comme hiver, l’équipe procède à deux études :
- une comparaison simple entre un mur en béton et un mur en BTC simple.
- une comparaison de plusieurs configurations de BTC avec modifications du motif de chaque brique et de l’agencement des briques entre elles.
Pour mener cette analyse, amàco et l’atelier Aïno fabriquent trois murets prototypes en BTC à partir des terres fournies par Cycle Terre, selon les 3 hypothèses suivantes :
- augmentation de l’inertie thermique, en haussant le volume des blocs de terre crue par des motifs en surépaisseur avec un appareillage massif ;
- amélioration de la régulation hygrothermique, en démultipliant la surface des BTC et en créant un appareillage ajouré en vue d’accroître les zones d’échanges avec l’air ;
- valorisation de l’aspect tactile de la terre, en travaillant des textures et reliefs sensibles, mis en lumière par une maçonnerie enveloppante.
La méthode de recherche par le “faire”
Ce projet de recherche s’effectue dans une démarche itérative entre design, production des prototypes et quantification des performances. Atelier Aïno développe le dessin des blocs et des appareillages, appuyé par l’expertise technique du bureau d’études terre d’amàco. Fabriqués par l’atelier Aïno et amàco à partir de la terre préparée par CycleTerre, les prototypes sont issus d’une expérimentation in situ des textures et des appareillages préalablement dessinés. Les ingénieurs de Franck Boutté Consultants, par une approche calculatoire, quantifient si ces BTC ornementés et appareillés spécifiquement présentent un intérêt pour le confort hygrothermique (régulation et déphasage).
Les résultats de la recherche
Les comparaisons effectuées indiquent à ce stade que le critère le plus influant est celui du volume. Celui-ci accroît la masse et donc l’inertie, ce qui permet d’une part de mieux réguler les températures malgré les variations du thermomètre extérieur et d’autre part de limiter les ambiances chaudes en été. Ainsi, lors d’une semaine d’été type, on repère que l’ambiance de la pièce est bien plus confortable avec une cloison très épaisse en BTC : la température est inférieure de 4°C par rapport à une cloison standard en BTC, et de 7° par rapport aux plaques de plâtre (BA13). La régulation des températures avec les BTC est également bien meilleure qu’avec des plaques de plâtre, et ce quel que soit la morphologie de la cloison. Au cours de la recherche, on a également remarqué que les cloisons fines composées avec des BTC à motifs volumineux régulent aussi bien que les cloisons épaisses : la solution est intéressante pour améliorer le confort sans empiéter sur la surface du logement. L’effet du motif est en revanche négligeable sur les appareillages déjà massifs. Des influences de la surface et de la perforation des briques ont pu être remarquées sous certaines conditions d’épaisseur de cloison ou de ventilation par exemple. Ces résultats restent encore complexes à interpréter aujourd’hui et demanderait une poursuite de l’étude. Evidemment, les qualités hygrorégulatrices et environnementales des BTC ont été soulignées par la recherche, ces matériaux étant 2,5 à 6 fois meilleurs que le béton ou le plâtre lorsqu’on compare leur impact carbone et l’énergie dépensée lors de leurs fabrications respectives.
Une recherche présentée aux professionnels et au grand public
Des évènements professionnels et grand public ont accueilli la recherche : expositions des prototypes à la Biennale d’Architecture et du Paysage 2022 puis à la Fabrique Cycle Terre, présentation lors de la formation amàco Construire en maçonnerie terre crue, conférence à l’Ensa Versailles, etc. La recherche entre en résonance avec l’engouement du secteur du bâtiment pour la terre crue, matériau ancestral qu’on redécouvre aujourd’hui. Les prototypes, avec leurs cannelures fuselées ou la légèreté de la claustra, renouvellent l’image brute ou rustique parfois associée à la technique.
La méthode de ce projet est celle de l’expérimentation. Elle privilégie la dépense en « matière grise » plutôt qu’en solutions technologiques pour développer un argumentaire visant à massifier l’utilisation des terres d’excavation dans la construction, et ainsi proposer des alternatives biosourcées et géosourcés face au tout béton.
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Acteurs du projet de recherche: Atelier Aïno (porteur), amàco, Franck Boutté Consultants
Partenaire : Les Grands Ateliers
Dans le cadre de : FAIRE PARIS 2021, programme de recherche et d’expérimentation lancé par le Pavillon de l’Arsenal avec le soutien de la Ville de Paris, la Caisse des Dépôts, EDF et MINI.
Période : 2022
Origine des terres : issues du chantier du Grand Paris / préparées et fournies par Cycle Terre